Aujourd’hui je vais vous raconter l’histoire de ma (presque) première course d’arêtes – c’est en réalité la deuxième puisqu’elle fait suite à une initiation avec un guide diplômé.
Je n’ai pas perdu de vue mon objectif, à savoir devenir autonome en montagne, alors il est temps d’entrer dans le vif du sujet ! Nous sommes le 21 octobre : deux semaines après ma première sortie avec le GAUL (pour les nouveaux arrivants, lisez mon article escalade à Omblèze !), je m’embarque dans une première course d’arêtes accompagnée de Stan et de nos deux encadrants bénévoles.
5h45, le réveil sonne. Il fait nuit bien sûr, mais le ciel de ce samedi matin est dégagé et ça devrait tenir jusqu’au soir. Pas tout à fait réveillés, nous retrouvons nos guides, qui profitent de la centaine de kilomètres qui nous séparent du massif de Belledonne pour nous présenter l’organisation de la journée. Deux cordées autonomes, un jeu de coinceurs câblés pour les premiers de cordée, quelques friends, une tripotée de sangles, des mousquetons en pagaille et c’est parti !
Une fois sur place, la première étape mais pas des moindres : la marche d’approche ! Une rando à elle toute seule plus qu’une marche d’approche, avec ses 900 mètres de dénivelé positif et son beau point de vue sur la Chartreuse, qui se reflète dans l’eau du lac du Crozet. Après 1h45, nous apercevons enfin le pied du Petit Râteau, point de départ de notre ascension. On s’équipe, on définit les cordées.
J’en profite pour ouvrir une petite parenthèse : connais-tu le principal facteur à prendre en compte pour définir les cordées ? C’est le poids. L’idée, c’est d’avoir le moins de différence de poids possible entre les deux alpinistes. Pourquoi ? Pour éviter que la chute de l’un n’entraîne celle de l’autre ! Le but d’être encordés, c’est de pouvoir retenir une éventuelle chute de son binôme. Aussi simple que de l’escalade en salle, jusque-là !
Récit d’une traversée pleine de surprise
On démarre donc sur les chapeaux de roue, et je suis scrupuleusement les conseils de mon mentor d’un jour. Pensez à passer la corde à droite, puis à gauche pour que l’arête nous sécurise ; récupérer les sangles ; les attacher autour du torse avec un mousqueton ; garder la corde tendue quoi qu’il arrive. L’alpinisme, ça ne manque pas de technique ! Mais c’est passionnant de se sentir investie dans la progression, de comprendre pourquoi chaque manip’ a son importance. Nous avançons donc corde tendue, et rejoignons le premier rappel.
Tout d’un coup, notre expédition prend des allures de course contre la montre. Il y a du monde derrière nous, mais surprise : Stan et moi avons un énorme trou de mémoire concernant la manip de rappel ! C’était sans compter sur la pédagogie d’Anaël, on s’élance enfin et une fois la terre ferme regagnée, la crise n’est plus qu’un mauvais souvenir. On a terminé notre première arête du jour !
Sans perdre de temps, on s’attaque à la suite. La fameuse Dent du Loup, point culminant de la course avec ses 2 375 mètres. Les automatismes commencent à se mettre en place, chacun assimile le rythme de son binôme et les deux cordées fonctionnent plutôt bien. Au deuxième rappel, c’est un sans-faute. Vache, pose du machard, du descendeur, on dirait (presque) qu’on a fait ça toute notre vie !
On s’attaque finalement à la dernière arête, les Jumelles. Une longueur plus aérienne, à laquelle la course doit son niveau Assez Difficile (cotation AD). Elle s’apparente plus à de l’escalade, c’est un 4b, sans difficulté majeure quand on passe en second et que les protections sont déjà en place. La différence avec une longueur en couenne, ce sont les chaussures, plus imposantes et dont la précision est relativement limitée. C’est au sommet de cette belle longueur que nous décidons de dégainer le pique-nique. Décidément, tout a une saveur différente là-haut, lorsque la nature vous offre une vue à 360° sur les merveilles environnantes, le lac du Crozet quelques centaines de mètres en dessous.
A tâtons, j’apprends à leader une cordée
Cette journée aurait déjà pu être qualifiée de parfaite si on s’était arrêtés là. Mais, cerise sur le gâteau, les novices que nous sommes nous voyons proposer de passer leaders de cordée. Mélange d’enthousiasme et d’appréhension. Je progresse du mieux possible et choisis souvent la facilité de poser une sangle sur un becquet, malgré toute ma volonté à utiliser les câblés et friends qui me tiennent compagnie le temps d’une longueur. Après trois essais, je finis par trouver une fissure qui me parait adaptée, je choisis mon coinceur et le place. Pas de pose de friend pour aujourd’hui, ce sera mon défi de la prochaine fois !
L’aventure ne se termine jamais au sommet
L’aventure ne se termine pas au sommet. Il est maintenant temps de prendre le chemin du retour et nous faisons durer le plaisir autour d’un rafraichissement à la Gelinotte, passage obligé pour tous les aventuriers qui démarrent du parking du Pré Raymond. Nous découvrons la tradition Orange/Citron, compte-rendu obligatoire pour chaque sortie du GAUL qui consiste à faire le bilan du positif et du négatif de la journée. Autant nous n’avons pas manqué d’éloges pour la partie « Orange », autant c’était silence radio côté « Citrons », c’est dire à quel point nous avons apprécié notre journée ! Sur la route du retour, j’ai des souvenirs pleins la tête et des projets qui se forment déjà. Non, vraiment, l’aventure ne se termine jamais au sommet.
C’est plutôt là, au sommet, qu’elle commence.
Et vous, votre première course d’arêtes, c’était comment ? A vos marques, prêts, racontez !
Coinceur, friend, becquet, sangle… vous avez des questions concernant les termes techniques de cet article ? C’est normal, promis ça va rentrer ! On se retrouve très vite, en attendant, je vous propose de découvrir mon lexique montagne.
Estelle